"L’ÉDUCATION NATIONALE SUFFOQUE. L’ENSEIGNEMENT SUPéRIEUR AGONISE. C’EST L’ÉTAT QUI RISQUE DE S’EFFONDRER. "

15 avril 20240

Judicaël Bouassa est l’auteur de "La Crise de la Voix" parue aux éditions Bistephe. Il est aussi enseignant de formation, sorti de l’École Normale supérieure( ENS) du Gabon. Le pédagogue et écrivain a accepté de répondre aux question de la rédaction.

Vous êtes l’auteur de l’ouvrage "La Crise de la voix", votre première œuvre littéraire. Quelle est la source de motivation qui vous pousse à coucher noir sur blanc, ce texte à la découverte de la Cité 70 ?

Il y a deux aspects majeurs qui m’ont amené à tisser cette œuvre, l’un personnel et l’autre collectif. Il s’agit de la désillusion et la déception. Sur l’élan personnel. Le vécu au sein de l’univers cité dans l’œuvre a fait tomber toutes mes illusions. La désillusion fut brutale. En effet, l’image que j’avais de ce temple du savoir contrastait avec les réalités de la Cité 70 : des multiples dérives muettes.

Sur le plan collectif, les témoignages que j’avais collectés après ma gracieuse désillusion m’ont permis de mesurer l’ampleur de la dégradation de ce milieu. L’œuvre "La crise de La Voix" d’ailleurs révèle certaines de ces dérives. Ce fut une déception totale.

Très vite, le dégoût s’empara de moi. Comment un si bel outil pouvait être saboté à ce point ? Dès lors, je compris que ce fardeau était mien. Mieux, je trouve énorme la légèreté déconcertante avec laquelle les dérives observées dans la Cité 70 sont évoquées. Pour conséquence première, les victimes de toutes ces pratiques malsaines sont soit taxées de faibles ou ne sont pas crus du tout. Pourtant, tout le monde le sait, mais personne n’ose en parler. Alors l’horreur fermente. Rien que des murmures qui s’échappent des âmes saccagées tels des gribouillis infantiles. Personne n’accorde du crédit à ces murmures. D’ailleurs, les belles langues disent que " il n’y a pas de plaintes qui prouveraient l’existence de pratiques déviantes." J’ai, dès ce moment, résolu de me jeter à l’autel comme une offrande pour payer le prix de la cessation ces dérives.

Par exemple la brimade en milieu universitaire. Elle est banalisée, pourtant des centaines d’étudiants voient leurs rêves s’éteindre à cause de ce phénomène réprimé fortement aux sphères inférieures. Que dire des violences verbales ? Des méthodes d’enseignement et d’évaluation de certains ? Il faut que cela cesse, surtout que de plus en plus, les apprenants très jeunes accèdent au supérieur.

Voici déclinée la motivation.

En parcourant l’univers page à page de cet ouvrage, cela donne l’impression que vous êtes un homme indigné. Pourquoi l’êtes vous ?

L’indignation est si légère. C’est le courroux qui traduirait mieux mon état. Je ne peux ni chanter, encore moins danser pendant que la mesure de grandeur est en lambeaux. L’Éducation nationale suffoque. L’enseignement supérieur agonise. C’est l’État qui risque de s’effondrer.

Ne nous réjouissons pas de l’éventail éducatif que le vent politique bouge. Faites parler les bouches des techniciens "honnêtes" de notre système éducatif. Ils nous diront que la situation est inquiétante, voire alarmante. Le supérieur a été laissé des années durant sans véritable surveillance. Ainsi le chaos a gagné du terrain.

Il ne faut pas chanter alléluia juste pour la réhabilitation des infrastructures universitaires, car il y a plus urgent. Les pratiques. Sinon cela ressemblera à blanchir des tombeaux. Il faut raviver le code de déontologie, la pédagogie et la discipline. Ainsi, nos enfants iront de moins en moins se faire tabasser à l’extérieur en quête de formation adéquate.

Il est dans la conscience populaire des Gabonais qu’après l’obtention du baccalauréat, il faut continuer à l’extérieur. Pourquoi ?

"La Crise de la voix" paru aux éditions Bistephe. Comment a été la collaboration entre l’auteur et l’éditeur ?

La collaboration est enrichissante. Ce premier voyage mien dans le monde de l’édition m’aurait été assez épuisant, sans la qualité pédagogique de monsieur Bissangoye, un vrai visionnaire. C’est le rapport humain que j’ai que j’ai trouvé très chaleureux. C’est presque le pilier central de cette maison d’édition Bisteph. Je suis très satisfait d’ailleurs de l’accompagnement que j’ai bénéficié.

Propos recueillis par Martial TSONGA

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